Mieux connaître la Jussie pour pouvoir lui faire face !

le 23 Sep 2019
Forence Savry

Arrivée en mars dernier pour 6 mois de stage à l’antenne amiénoise du CBNBL, le rôle de Florence Savry consistait à faire l’état des connaissances concernant les populations de Jussie à grandes fleurs (Ludwigia grandiflora) dans la moyenne vallée de la Somme. Grâce au recueil de données bibliographiques, aux témoignages de locaux et à des prospections en canoé sur environ 72 hectares entre Ailly-sur-Somme et Picquigny, elle a pu dresser une cartographie actualisée des stations où cette espèce exotique envahissante se développe. Au total, ce sont plus de 8 000m² de Jussie qui ont été cartographiés.

Pourquoi une telle étude ?

En plus de dresser cet état des lieux lui ayant permis de constater une évolution des populations de l’espèce dans le temps, Florence a récolté diverses informations afin de caractériser les habitats dans lesquels la Jussie se développe préférentiellement. Elle a ainsi réalisé de nombreux relevés phytosociologiques ainsi que des mesures telles que la profondeur en eau, les hauteurs de vase, l’orientation et la pente des berges suivies, la turbidité de l’eau, etc. Les usages et le degré de fréquentation des sites inventoriés et leurs connexions avec d’autres milieux ont également été étudiés.

Son but ? Connaitre au mieux les préférences écologiques de cette espèce ainsi que ses principaux moyens de dispersion pour pouvoir élaborer un plan d’actions de lutte le plus adapté et donc le plus efficace possible, à l’échelle de la vallée.

Des résultats à pondérer

A l’issue de son stage, Florence a pu proposer une liste de végétations dans lesquelles elle a rencontré le plus souvent la Jussie et donc étant potentiellement les plus favorables à l’installation de cette espèce. Il s’agit, dans l’ordre, du Phragmition communis (roselières sur sol minéral eutrophe à inondation prolongée), du Magnocaricion elatae (végétations des sols tourbeux mésotrophes engorgés en surface),  du Carici pseudocyperi - Rumicion hydrolapathi (végétations de cicatrisation des sols tourbeux mésotrophes longuement engorgés en surface) et enfin du Nymphaeion albae (herbiers flottants des eaux calmes moyennement profondes mésotrophes à eutrophes).

Globalement, dans ces communautés végétales, elle a pu observer une baisse de la diversité floristique en présence de Jussie. Cependant, comme il a été difficile de pouvoir comparer des placettes envahies à des placettes « saines » possédant toutes deux les mêmes paramètres écologiques, ces résultats ne sont que des observations de terrain et ne sont pas statistiquement significatifs.

Florence a également pu conclure sur le fait que des facteurs abiotiques comme le sens des vents dominants, la présence de vase en quantité ou la teneur en nutriments de l’eau étaient des facteurs primordiaux à prendre en compte lors de la gestion, car ils influençaient directement l’installation et la propagation de l’espèce.

Un plan d’actions basé sur la communication

Afin de pouvoir élaborer un plan d’action à l’échelle de la région, elle a participé à de nombreuses réunions avec les acteurs locaux (gestionnaires, élus, etc.). Un chantier d’arrachage a été organisé avec les fédérations de chasse et de pêche locales afin de sensibiliser leurs adhérents, principaux usagers des zones humides du département, à la connaissance de l’espèce ainsi qu’aux bonnes pratiques d’entretien et de lutte contre celle-ci. Tout ceci dans le but d’éviter l’expansion de la Jussie dans la vallée, par méconnaissance, comme c’est bien souvent le cas.

 

Photo : A. Watterlot

Les travaux engagés par le CBNBL ont été réalisés dans le cadre du programme « d’actualisation, de valorisation des connaissances et de conservation de la flore sauvage et des végétations [Phase 2] ». Celui-ci a bénéficié du soutien financier de l’Union Européenne (Fonds FEDER), de l’État, du Conseil régional des Hauts-de-France, et des départements de l’Oise et de la Somme.